jeudi 18 décembre 2014

THE SHOP AROUND THE CORNER - Rendez-vous


Réalisation : Ernst Lubitsch
Société de production : Metro-Goldwyn-Mayer
Genre : Comédie romantique
Durée : 99 minutes
Date de sortie : 12 janvier 1940 (USA)
Casting :
James Stewart : Alfred Kralik
Margaret Sullavan : Klara Novak
Frank Morgan : Hugo Matuschek



L’HISTOIRE

Dans une petite boutique de Budapest, un jeune employé correspond par lettres interposées avec une femme qu’il n’a jamais vue, avant de se rendre compte qu’elle n’est autre que sa nouvelle collègue, qu’il ne peut pas supporter…


L’AVIS DE FU MANCHU

The Shop around the corner est sans doute mon film préféré d’Ernst Lubitsch, et, comme souvent avec ce réalisateur, m’a beaucoup marqué par son atmosphère très particulière… Il y a un brin de nostalgie dans ce film, un charme suranné amplifié par le décor – Budapest, soit la vieille Europe au début du XXème siècle – mais aussi par le nom des lieux et des personnages : Kralik, Novak, Matuschek & Compagnie, etc.



Dans cette ambiance si singulière, qui donne l’impression d’évoluer dans un conte de Noël, comme hors du temps, nous voici au cœur d’un magasin de maroquinerie de Budapest, à la rencontre de ses employés : tous ont une personnalité bien à eux, du vieil homme bonhomme un peu perdu au jeune coursier volubile et farceur. Parmi eux, Alfred Kralik (James Stewart) est un homme comme les autres, vendeur modèle à la vie simple et paisible, et qui attend peu de la vie. Qu’il ait été invité à dîner par son patron, le grand Mr. Matuschek, et qu’il ait parlé à la grande et belle Mme Matuschek, lui ne s’en soucie guère. Car une seule chose lui importe dans son quotidien morne : les lettres qu’il échange depuis quelque temps avec une femme inconnue, échange qui a commencé par hasard, quand il a répondu à une annonce qu’elle avait fait paraître dans un journal. Conversations par plumes interposées, mais ô combien enrichissantes pour Mr Kralik, qui ne rêve qu’à sa dulcinée de papier…

L’histoire de The Shop around the Corner est remarquablement introduite, car c’est bien dans un univers somme toute « banal » qu’elle intervient : ces lettres échangées sont le point de départ de l’intrigue, et c’est l’arrivée de Klara Novak (Margaret Sullavan) qui va chambouler le monde de Kralik. Avec elle, il ne s’entend pas. Ils ne se comprennent pas, chaque phrase est interprétée de travers, et pourtant… Et pourtant, le scénario de l’histoire joue des tours aux deux jeunes gens, puisque la personne qu’ils admirent plus que tout au monde, qu’ils rêvent de rencontrer sans l’avouer, est ce même collègue dont ils ne supportent plus la conversation !

Cette situation est très intéressante, et tout au long du film, ces deux relations seront étudiées et opposées : quelle est la meilleure relation ? Celle entre deux personnes qui ne se sont jamais rencontrés, mais s’admirent et se plaisent à distance, ou celle entre deux personnes qui s’aiment car se connaissent physiquement ? Au premier abord, l’on pourrait penser que la première est plus « pure » : ils tombent amoureux pour leurs pensées et leurs idéaux, pas pour leur physique. Mais Lubitsch montrera finalement que, non pas que la seconde soit « meilleure », elle est la seule qui soit souhaitable car c’est en se rencontrant, en se « voyant », qu’un homme et une femme se plaisent et tombent amoureux. Si la question d’affinités par goûts est abordée dans les lettres à distance, rien ne vaut de se côtoyer au quotidien pour s’apprécier (thème étrangement moderne, que l’on pourrait appliquer aux sites de rencontre en faisant les mêmes remarques).
Cela dit, le film montre aussi que ce n’est pas parce que deux personnes ne se plaisent pas au premier abord qu’ils ne sont pas faits l’un pour l’autre : au fond d’eux même, Kralik et Klara ont une personnalité très semblable puisqu’ils se sont plu en se livrant par écrit ; il leur faut juste apprendre à se (re)connaître, à se fréquenter.

Well, if you don’t like Miss Novak, I can tell you right now you won’t like that girl – Why ? – Because IT IS Miss Novak… 

James Stewart joue Mr Kralik, et est une fois de plus excellent dans ce rôle de jeune homme simple,  qui cache sous ses airs discrets et maladroits un charme certain… Comme toujours dans leurs films en commun, il semble parfois comme ensorcelé par Margaret Sullavan, qui interprète Miss Novak, et leur alchimie est palpable – et pour cause, ils se connaissaient bien avant leurs débuts d’acteurs… Pour l’anecdote, Sullavan aurait d’ailleurs joué un rôle très important dans le début de la carrière de Stewart (merci Margaret !).
Ses regards affectés devant ce qu’elle pense être un homme sans aucun intérêt sont souvent très drôles, et ses « Mister Kralik » répétés sans cesse avec un regard de dédain ponctuent le film pour notre plus grand bonheur (« Ooh, Mister KRALIK !!! Kss kss… »). On remarquera d’ailleurs que le choix des noms des personnages constitue un élément comique du film, alors que ce sont des noms très courants en Hongrie (surtout Novak). Mais entendre le nom de « Kralik » à tout bout de champ dans un dialogue en anglais engendre un effet de comique de répétition très efficace…
Mister Kralik !… It’s true we’re in the same room… but we’re NOT in the same planet

Les dialogues, justement, sont très bien construits, et il m’a vraiment fallu revoir certains passages plusieurs fois pour en saisir toute la subtilité (il est vrai que l’anglais n’est pas non plus ma langue maternelle…). Le film n’en est par conséquent que meilleur et plus appréciable à chaque revisionnage, et c’est bien la marque d’une très bonne œuvre…



Conclusion

Un film de Lubitsch et ses ambiances si surannées, plus James Stewart et son air sympathique, plus Margaret Sullavan et son alchimie avec le dernier cité, voilà de quoi faire une comédie romantique des plus réussies. The Shop around the corner, c’est un petit peu l’ancêtre des célèbres rom-coms des années 90 à la Tom Hanks et Meg Ryan… Petit hommage en passant, dans You’ve got mail (1998), la librairie de la jeune femme s’appelle d’ailleurs… « The Shop around the Corner ».

Note : 8,5/10







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